La Ville de Rigaud est forcée de prendre des décisions difficiles pour les sinistrés des inondations
« Tout le monde veut aider, mais nous sommes toujours en attente de réponses. » - Hans Gruenwald Jr.
Devant l’incertitude et le non-engagement du gouvernement du Québec de ne pas défrayer l’ensemble des frais d’hébergement, situation qui perdure depuis plus de 5 semaines maintenant, la Ville de Rigaud, très préoccupée par le poids financier des inondations et par la stabilité psychologique de ses citoyens sinistrés, est forcée de revoir sa position quant à l’application du programme d’hébergement d’urgence et d’aide alimentaire administré par la Direction du rétablissement du ministère de la Sécurité publique (DRÉ/MSP). C'est du moins ce qui a été annoncé en point de presse, le vendredi 24 mai, 37 jours après le début des inondations.
En effet, une semaine après que la Ville ait activé ses mesures d’urgence le 17 avril dernier, le gouvernement du Québec annonçait que, dorénavant, la totalité des frais d’hébergement d’urgence et d’alimentation était absorbée par les Villes. Puis, la décision fut de nouveau changée en acceptant d’absorber 75% des frais engagés, mais en renouvelant uniquement par tranche de 15 jours pour un maximum de 3 renouvellements. Donc, au 31 mai, la Ville risque d’assumer seule 100% de la facture, ce qui peut représenter, selon les conditions actuelles d’hébergement, jusqu’à 100 000$ par semaine.
En conférence de presse, la directrice générale de la Ville de Rigaud, Chantal Lemieux, soulignait : « depuis les 5 dernières semaines, la facture pour l'hébergement s'élève à 1 million $. Considérant que le gouvernement remboursera 75%, la Ville aura donc à débourser 250 000 $. Mais si le gouvernement ne renouvelle pas son entente, à compter du 31 mai, Rigaud devra assumer 100 % de la facture. »
Toujours selon Mme Lemieux, en 2017, la facture totale s'élevait à 1M$, excluant les frais d'hébergement qui étaient assumés à 100% par le gouvernement. « En 2017, le gouvernement nous a remboursé 600 000$ et la Ville a déboursé la balance. »
« La vraie question est : pourquoi est-ce qu'on ne peut pas revenir à l'entente de 2017 ? », a ajouté le maire de Rigaud, Hans Gruenwald Jr.
Questionné à savoir comment sont les communications avec le gouvernement, M. Gruenwald mentionnait : « Tout le monde veut aider, mais nous sommes toujours en attente de réponses. Dès que l'on met un peu de pression, ils prolongent leur aide de deux semaines. Nous, tout ce que nous voulons, ce sont des réponses. Non est une réponse même si ce n’est pas celle que l'on veut. Au moins, nous pourrions nous enligner. »
Et si justement la réponse du gouvernement est non? Et si le gouvernement refuse d'aider? « Et bien, le conseil municipal va s'asseoir et faire un examen approfondi de la situation. Nous aurons à agir en conséquence et prendre nos responsabilités », de dire le maire.
Un programme plus simple, mais encore
Invité à prendre la parole, le préfet de la MRC de Vaudreuil-Soulanges et maire de la Municipalité de Rivière-Beaudette, Patrick Bousez, a souligné avoir également de nombreuses discussions avec les autorités.
« Nous avons parlé avec notre députée provinciale, Mme Picard, avec le ministre Ian Lafrenière, avec le ministre Christian Dubé et encore là, nous avons plusieurs questions qui demeurent sans réponses. On nous répète que le nouveau programme d'aide aux sinistrés est plus rapide, mais le hic c'est que nous ne sommes pas encore rendus là. Nous ne sommes même pas encore au stade de rétablissement. Présentement, nous devons assurer un minimum de qualité de vie à nos sinistrés. La situation actuelle n'est pas viable à long terme. »
Le Collège Bourget ouvre ses portes aux sinistrés
Devant un tel enjeu financier, lequel aura assurément un impact important sur l’ensemble de la Ville, les chambres mises à la disposition de la Ville par le collège Bourget devenaient la meilleure solution pour maintenir un hébergement d’urgence aux citoyens sinistrés tout en limitant les dépenses.
Ainsi, dès la semaine prochaine, les citoyens qui se présenteront au Centre d’aide aux sinistrés seront relocalisés au collège Bourget dans une aile spécialement réservée pour eux. La sélection se fera au hasard, tout en excluant les citoyens à mobilité réduite.
Le collège a, pour l’instant, mis 30 chambres à la disposition de la Ville puis, au fur et à mesure que les étudiants quitteront pour la saison estivale, d’autres se libéreront. Également, puisque plusieurs personnes sinistrées se trouvent chez des amis ou de la famille, ou qu’ils ont accès à une cuisine, l’aide alimentaire d’urgence sera arrêtée à compter de leur prochain renouvellement.
Une décision responsable
Malgré que les mêmes services soient offerts aux citoyens touchés par la crue 2019, ces solutions feront une grande différence pour l’administration. Seulement pour la Ville de Rigaud, plus de 200 citoyens sont hébergés et près de 190 personnes reçoivent de l’aide alimentaire depuis maintenant plus de 5 semaines.
Tous les trois jours, ces derniers doivent se présenter au Centre d’aide aux sinistrés afin de renouveler les services offerts. Plusieurs se font alors déplacer d’un hôtel à l’autre par manque de disponibilité des chambres. La Ville, quant à elle, n’a jamais de garantie que cette aide sera renouvelée.
Pelleter la responsabilité aux Villes
La Ville de Rigaud déplore d’avoir à se retrouver dans une situation financière aussi préoccupante et d’avoir à gérer, pendant qu’elle se trouve toujours en mesure d’urgence, des volets du programme du gouvernement alors que c’était ce dernier, en 2017, qui en avait la responsabilité. Comme elle n’est pas autorisée à faire un déficit à la fin de l’année, la Ville est très préoccupée de la façon dont elle pourra se sortir de cette situation.
Elle réitère l’appel lancé par la MRC de Vaudreuil-Soulanges, il y a de cela déjà un mois, de demander au gouvernement de revoir sa position et d’assumer 100% des frais d’hébergement, comme c’était le cas en 2017.
Texte écrit en collaboration avec Marie-Claude Pilon