« On est encore là »
Dans les coulisses … du métier de laitier
Dans le cadre du premier reportage de la série Dans les coulisses de... par Néomédia, pourquoi ne pas s’intéresser à une profession que plusieurs auraient cru disparue. Jonathan Lavergne, laitier dans la région de Vaudreuil-Soulanges depuis près de dix ans, nous a partagé l’envers du décor de son quotidien.
« C’est plutôt rare que quelqu’un étudie au secondaire et dise un jour dans la vie je vais devenir laitier », admet Jonathan Lavergne, propriétaire de DSTRB. J. Lavergne. Malgré tout, cela fait maintenant un peu plus de dix ans qu’il a repris les rênes de l’entreprise familiale. Auparavant dirigée par son oncle, la compagnie avait été elle-même reprise du père de ce dernier qui avait lancé le bal en 1959.
Outre le fait de se lever tôt, M. Lavergne garde de bons souvenirs de ses étés et de ses journées pédagogiques à distribuer du lait avec son oncle Daniel quand il était adolescent.
À son décès en 2010, ses cousines ont vu en lui l’étoffe d’un laitier. « Jusqu’à un certain point quand j’ai commencé vers 18-19 ans, je m’étais dit je vais faire ça deux ou trois ans et je vais voir où ça mène. J’ai 29 et je n’ai pas eu le temps de m’arrêter. Le temps passe tellement vite, les journées sont pleines, les semaines passent vite et si je ne me suis pas arrêté à ça, ça doit être parce que j’aime ma job », souligne-t-il.
Une photo de son oncle est accrochée dans le camion afin de lui permettre de continuer à voir d’une certaine façon ce qu’il a bâti depuis 1974.
Une profession qui s’est adaptée
Alors que dans les années 50, les laitiers livraient essentiellement des bouteilles en vitre, désormais la gamme de produits s’est particulièrement étendue. Même si le nom de laitier est resté, des marchandises comme du fromage, du yogourt, du beurre, de la crème sure, et bien d’autres se sont ajoutés dans leurs caisses.
M. Lavergne fait aussi part des systèmes de réfrigération qui se sont transformés depuis. À l’époque, les camions étaient isolés et le tout était refroidi avec des cubes de glace.
Toutefois, selon lui, le plus gros changement s’est fait dans les dernières années avec l’avènement des achats en ligne. « Je me rappelle, quand je travaillais avec mon oncle, les clients laissaient leur commande sur un papier à la porte ou mettaient une carte à la fenêtre pour indiquer qu’ils avaient besoin de lait. » La technologie actuelle rend les opérations beaucoup plus efficaces.
D’ailleurs, M. Lavergne prévoit lancer son propre site web dans les prochaines semaines afin de faciliter la relation avec le client. À l’heure actuelle, les gens doivent passer à travers une plateforme web où les commandes sont ensuite subdivisées entre les cinq laitiers de la région selon leur territoire.
L’esprit n’est en revanche pas à la compétition. « On est comme une petite famille, on a nos entreprises indépendantes et on s’aide le mieux qu’on peut », témoigne-t-il.
Ils s'approvisionnent tous à partir d’un entrepôt à Pincourt. À eux cinq, ils couvrent Vaudreuil-Soulanges et une partie de l’ouest de l’île de Montréal. M. Lavergne s’occupe quant à lui des municipalités de Saint-Lazare, Sainte-Marthe et Les Cèdres.
La run de lait
Le métier de laitier a évolué au fil des ans en ne se concentrant plus uniquement sur la clientèle résidentielle, mais aussi sur celle plus commerciale. Parmi les clients de M. Lavergne, il y a des maisons privées, mais également des garderies, des cafés, des dépanneurs, des restaurants, des boulangeries et d’autres plus saisonniers comme des crèmeries et des campings.
La pandémie de COVID-19 est néanmoins venue redonner plus de poids au secteur résidentiel. Cela a « explosé » depuis mars pour Lavergne. Les habitudes d’achat des gens ont changé, mais le besoin en produits laitiers est toujours là. « Un produit comme du lait, c’est un produit que les familles consomment tous les jours. » La demande a donc augmenté, ce qui a valu à son père Ronald de venir l’aider tôt en journée, ce qui lui évite de finir très tard.
Jonathan Lavergne commence dès quatre heures du matin et ne voit parfois pas la fin de sa journée avant 21h. « On dirait que c’est comme une routine, quand tu es habitué de faire des journées de 15 heures, tu es habitué d’être fatigué », dit-il en ricanant.
Fausses croyances
Jonathan Lavergne tenait à spécifier que contrairement à la croyance populaire, le service n’est pas plus cher que d’aller soi-même au supermarché. Ce dernier indique avoir des prix compétitifs et qu’il n’y a aucuns frais de livraison, ni aucun minimum d’achat.
Il explique aussi avoir un roulement dans sa clientèle. « On entend dire que les enfants sont plus vieux, donc on boit moins de lait et on va l’acheter à l’épicerie. C’est difficile de gagner un client et c’est facile d'en perdre un. C’est toujours de donner le meilleur service que tu peux », ajoute-t-il.
M. Lavergne conclut être conscient de ne pas sauver des vies, mais il estime son métier très important. « Nous ne savons pas ce que les gens que nous croisons traversent à chaque instant et on peut être là seulement pour une discussion ou être à l’écoute. Ensuite, quitter les lieux en sachant que j’ai fait sourire cette personne. Une pierre deux coups comme ils disent. »
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