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Accueil des travailleurs étrangers

Recrutement international: il reste du travail à faire

durée 18h00
2 octobre 2024
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Marie-Claude Pilon
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Par Marie-Claude Pilon, Journaliste

Depuis 2019, Josiane Leblanc, présidente et fondatrice de l'Agence Campi, comble un besoin dans la région du Suroît: rencontrer, accueillir et accompagner la main-d'oeuvre immigrante qui arrive au Canada pour vivre une vie meilleure. Même si le recrutement international gagne en popularité auprès des entreprises d'ici, il reste encore du travail à faire, notamment à propos de l'encadrement de ces nouveaux travailleurs, observe-t-elle. 

Même si elle a lancé son entreprise il y a maintenant cinq ans, Josiane Leblanc, a toujours été intéressée par l'immigration. Dans le passé, elle a posé ses valises six mois au Honduras pour y compléter un stage, en plus de faire de même au Mexique. 

Ayant elle même vécu à l’international, elle a choisi de faire bénéficier les entreprises de ses connaissances en matière de bonnes pratiques d’accueil en contexte interculturel. Passionnée par les relations humaines, elle se démarque par son enthousiasme à rapprocher les gens autour d'elle : elle crée des ponts entre les individus avec qui elle intervient en instaurant des espaces de dialogues où il est possible de se parler franchement. 

Son intérêt marqué pour l'Humain l'a conduite vers des études de 2e cycle en médiation interculturelle. 

Offrir une belle expérience d'accueil 

Pendant la pandémie, elle a démissionné du Cégep de Valleyfield pour se consacrer à un nouveau projet. « J'ai acheté une maison où je logeais les travailleurs étrangers recrutés par des entreprises d'ici. C'était vraiment un projet de famille, puisque mes parents m'aidaient au quotidien. Notre objectif était vraiment de leur offrir une belle expérience d'accueil afin qu'ils veuillent revenir avec leur famille et s'établir ici de façon permanente. Les premières semaines sont cruciales pour l'accueil ; c'est ce que j'ai vécu lors de mes séjours dans d'autres pays : si les 2 premières semaines se passent mal, ils ne voudront pas rester ...et on perd de bons travailleurs», partage-t-elle d'entrée de jeu. 

Mme Leblanc baigne dans le milieu de l'immigration depuis plusieurs années. « Même dans mon quotidien que je partage avec un mon mari qui est au Québec depuis 18 ans. Je vis l'interculturalité au sein même de mon mariage. Sur le plan professionnel, via l'Agence CAMPI, je reçois des mandats des entreprises de la région qui désirent engager des travailleurs de l'extérieur. Je m'occupe du recrutement des candidats, mais aussi de tout le processus entourant leur arrivée dans leur nouveau milieu de vie. Il y a plusieurs étapes à prendre en considération. Parfois, les entreprises ne le savent pas ou encore, elles n'ont pas toutes les ressources humaines, pour les gérer ou s'en occuper. C'est là qu'on entre en jeu», ajoute-t-elle. 

Pour une entreprise qui désire embaucher de la main-d'oeuvre provenant de l'extérieur, on doit calculer des frais de milliers de dollars par personne. « Il faut vraiment être prêt à assumer tous les coûts liés à la venue d'un employé de l'extérieur au sein de notre entreprise. Ces frais sont liés à l'ouverture du dossier d'immigration, entre autres. »

Concrètement, lorsqu'elle obtient un mandat d'une entreprise, Josiane Leblanc prend en charge l'accueil des immigrants. Le processus peut s'échelonner sur un an. Elle s'occupe du recrutement des candidats issus de différents pays, de l'analyse de leurs besoins et de ceux de l'employeur, mais aussi de remplir tous les documents légaux et de la préparation du candidat. Pour leur part, les nouveaux arrivants ne déboursent rien pour franchir ces différentes étapes. 

 « Certains n'y croient pas jusqu'à ce qu'ils soient devant moi. Il faut les rassurer. Ils pensent, même, occasionnellement, que je recrute pour une agence d'escorte ou de prostitution. Mon rôle consiste aussi à les accompagner lors de leur première journée dans leur milieu de travail. On leur fait comprendre qu'ici, poser des questions, est bien perçu. Majoritairement, chez eux, le faire est synonyme d'idiotie. Or, ce n'est pas le cas au Québec.  Je les suis aussi pendant trois, quatre ou cinq mois, par la suite pour m'assurer que tout va bien et que les problématiques ne surviennent pas. On fait un plan de vie avec le candidat pour savoir ce qu'il veut faire pour son logement», explique-t-elle.  

Plusieurs défis auxquels sont confrontés les nouveaux arrivants 

Laisser sa famille, ses proches et sa maison derrière soi pour immigrer dans un nouveau pays et occuper un nouvel emploi représente un grand défi en soi. « Il est nécessaire de mettre en place une meilleure expérience d'accueil au sein des entreprises d'ici et d'optimiser les processus de productivité. Les gens qui arrivent font face à plusieurs enjeux, dont les barrières linguistiques, les différences culturelles et le manque de soutien. Il est important de bien les accompagner et de leur offrir une formation adéquate pour qu'ils s'intègrent bien à la vie au Québec. Par exemple, ils doivent bien comprendre nos expressions colorées. Il est capital que les employeurs assument leurs responsabilités vis-à-vis de leurs employés étrangers et de comprendre leurs compétences et leurs expériences. Ce ne sont pas seulement des employés, ce sont d'abord et avant tout, des humains. Les employeurs ont déjà beaucoup de responsabilités, donc je les aide à rendre l'intégration de la main-d'oeuvre étrangère plus efficace. »

Récemment, Josiane Leblanc est venue en aide à des travailleurs de Drummondville qui ont perdu leurs emplois.  « Je me suis rendue sur place. Dans une situation comme celle-là, les travailleurs sont coincés. Leur permis de travail est fermé, ce qui signifie qu'ils ne peuvent pas offrir leurs services ailleurs pour deux ou trois ans. Quand ils se tournent vers des services de première ligne, comme des banques alimentaires, ils obtiennent de l'aide. Par exemple, un seul panier de denrées pour un mois. Heureusement, nous avons pu les relocaliser dans ce cas-là après avoir établi un plan. D'autres sont rentrés chez eux. »

Plus près de nous, quatre travailleurs étrangers ont pu être embauchés chez Plombco, une usine de Salaberry-de-Valleyfield, après huit mois sans emploi. « Dans ce cas-là, il m'est arrivé de faire des épiceries, payées à partir de mon argent personnel, pour aider les quatre personnes. Je ne pouvais pas ne rien faire », avoue-t-elle en estimant son investissement à 2 500$ environ depuis le début de l'année. 

L'un des chevaux de bataille de Mme Leblanc est aussi de déstigmatiser les préjugés envers les immigrants dans leur nouvel environnement de travail. « Souvent, on trouve que les nouveaux arrivants sont des voleurs d'emplois ou qu'ils prennent la place de quelqu'un d'autre d'ici. Il faut désarmorcer tout ça. Dans l'une des entreprises avec laquelle j'ai travaillé, on s'est rendu compte que la personne chargée de former les nouveaux employés ne le faisait pas bien. Pourquoi? Elle était la seule à parler en espagnol et ne voulait pas se faire prendre sa place par l'un des nouveaux employés. Donc, elle ne leur communiquait pas toutes les bonnes informations nécessaires à son emploi. Il faut aussi adresser ses situations quand elles surviennent. C'est mon rôle de le faire, car souvent, les employeurs ne savent pas comment agir.» 

Quelles solutions pour améliorer la situation?

En terminant, quelle serait, selon Mme Leblanc, la solution pour mieux sensibiliser les entreprises de la région, et du Québec, à l'accueil des employés provenant d'ailleurs?

« On pourrait mettre sur pied une formation expliquant leurs responsabilités. L'idéal, serait aussi, que le gouvernement octroie des permis ouverts aux travailleurs immigrants. Ça leur permettrait de changer d'employeurs. Selon moi, ce serait une bonne chose, car ça inciterait les entrepreneurs à mettre en place des bonnes conditions de travail pour garder leurs employés à long terme», conclut-elle.  

Elle précise aussi en terminant que les employeurs sont un pilier important pour les candidats internationaux et souvent, ce sont par de petites améliorations des processus internes qu'on peut créer une expérience-employé positive. 

 

 

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