Elle veut parrainer sa mère de 79 ans d'origine française
Une Justinoise lance une pétition pour changer les choses en matière d'immigration
Injuste et inéquitable. Voilà les termes employés par la citoyenne de Sainte-Justine-de-Newton d'origine française, Tania Rampillon, à propos du processus de sélection du Programme de parrainage des parents et des grands-parents du gouvernement du Canada. Néomédia a pu s'entretenir avec celle qui a voulu déposer une demande de parrainage pour sa mère, Marithé Rampillon, en 2016.
Mme Rampillon qui travaille à la Coop CSUR de Sainte-Marthe depuis 2015 est l'instigatrice d'une pétition virtuelle visant à dénoncer le processus de sélection de ce programme fédéral.
À ce jour, près de 271 signataires ont apposé leurs noms sur le document virtuel qui sera éventuellement présenté par la députée de Salaberry-Suroît, Claude DeBellefeuille. Pour que ce soit fait et déposé devant la Chambre des Communes, la pétition virtuelle doit compter au moins 500 signatures.
L'histoire d'amour entre la famille Rampillon et le Québec a débuté dans les années 1970. « Ma mère s'y est installée à cette période. Je suis née ici. Nous sommes repartis en France peu de temps après ma naissance, je possède donc la double citoyenneté. En 1998, j'ai décidé de venir habiter au Québec. En 2014, le conjoint de ma mère est décédé et comme je suis sa fille unique, elle a décidé de revenir s'installer auprès de moi, de son gendre et de ses deux petites-filles », explique-t-elle.
À l'époque, un adjoint de la députée du Nouveau Parti démocratique (NPD) Anne Quach a parlé à Tania Rampillon du Programme de parrainage des parents et des grands-parents qui permet le parrainage d'un proche par un citoyen du Canada.
Puisque ce processus peut être de longue haleine, le gouvernement fédéral a mis en place le Super Visa pour les parents et les grands-parents qui permet au détenteur de rendre visite à ses enfants ou petits-enfants pendant cinq ans à la fois. « Il peut s'échelonner sur une période de dix ans au maximum. Ça semblait donc la solution parfaite pour nous. On se disait que le dossier de ma mère se réglerait pendant ce temps-là. Or, ce n'est pas encore le cas», ajoute-t-elle.
Marithé a donc vécu ici pendant 7 ans de 2016 à 2023 avant de devoir retourner en France. Son supervisa étant échu et le processus d’immigration inachevé… même pas entamé.
Une première démarche en 2016
Il y a maintenant près de huit ans, Tania a entamé les démarches de parrainage en remplissant et en fournissant tous les documents demandés.
«C'est une démarche complexe qui demande beaucoup de temps. La formule privilégiée pour le traitement des dossiers était premier arrivé, premier servi. J'ai envoyé le dossier de ma mère très tôt, j'étais donc assez optimiste. Cependant, un des formulaires avait été mal rempli, ce qui a contribué au rejet de ma demande d'emblée. J'ai recommencé tout le processus en 2017. La méthode de fonctionnement pour déposer une demande avait toutefois été modifiée », affirme-t-elle.
Le volume de dossiers étant trop élevé, le gouvernement fédéral a décidé de modifier sa stratégie. « Pendant la période de dépôt des candidatures, il fallait remplir un formulaire qui disait: Moi X désire parrainer X domicilié au X et l'acheminer au gouvernement. À la suite de la fermeture de la période des candidatures, c'est un tirage au sort qui déterminait quels dossiers seraient traités. Celui de ma mère n'a jamais eu la chance d'être choisi au hasard en 2018, 2019, 2020, 2022 et 2023. Peut-être qu'en 2024, ce sera notre tour», philosophe-t-elle.
C'est donc pour dénoncer cette façon de faire que Tania a lancé la pétition. « Je veux aussi déposer une plainte auprès du Ministère de l'Immigration pour dénoncer ce processus. La pétition est un premier pas dans cette direction, car elle donnera plus de poids à mon dossier si plusieurs personnes l'ont signé. Pour qu'elle soit parrainée par un député, il doit y avoir 500 signataires. Ce n'est pas notre cas en ce moment. J'espère que les gens seront sensibilisés à sa raison d'être et qu'ils y apposeront leur signature. Par la suite, nous aurons le poids nécessaire pour obtenir l'écoute du ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté du Canada, Marc Miller. »
De son côté, Claude DeBellefeuille n'hésite pas à dénoncer haut et fort les lacunes d'Immigration Canada. « Encore une fois, Immigration Canada nous démontre à quel point il est le ministère le plus dysfonctionnel de l'appareil gouvernemental fédéral. On ne parle pas ici de numéros, mais bien de gens. Et si un ministère devait agir de façon humaine, c'est bien celui de l'immigration. Force est de constater qu'il accumule les échecs », a indiqué la représentante de la circonscription de Salaberry-Suroît à Néomédia.
Notons également que Mme DeBellefeuille a envoyé une lettre au ministre Marc Miller pour lui demander de se positionner sur les lacunes du programme de parrainage de regroupement familial et pour lui faire des propositions d’amélioration du programme (par exemple, accorder une priorité aux dossiers qui ne sont pas sélectionnés après quelques années d’essais infructueux ou encore ou encore tenir informés en temps réel les demandeurs du statut de leur demande.
Une demande d'accès à l'information
Au cours des derniers mois, Tania a déposé une demande d'accès à l'information au Ministère de l'Immigration pour connaître l'état de sa demande. Était-elle encore dans la banque de dossiers parmi laquelle on tirait les cas à traiter?
« C'est un manque flagrant d'humanisme que de devoir faire une demande d'accès à l'information pour avoir des renseignements sur son propre dossier. C'est un non-sens. J'ai approché la députée de Salaberry-Suroît, Claude DeBellefeuille et elle a tout de suite fait preuve d'ouverture. Elle avait d'excellents contacts au Ministère de l'Immigration et une semaine plus tard, elle a pu me confirmer que ma demande se trouve toujours dans la banque de dossiers de 2020. C'est un soulagement.»
Avant ça, le bureau du député Peter Schiefke avait aussi fait des démarches pour aider la famille Rampillon. Depuis le début de ses démarches, Tania peut compter sur le soutien de Bianka Dupaul, son amie et alliée.
« Marithé est âgée de 79 ans et pour le moment, sa santé est bonne, mais on ne sait jamais comment la situation peut évoluer. C'est une grande source de stress, à la fois pour Tania et pour Marithé. On veut faire bouger les choses. Il faut faire bouger les choses», confie Mme Dupaul.
Un appartement qui l'attend à Rigaud
Marithé est toujours propriétaire d'un condo dans la région. Condo qu'elle occupait lors de son passage au Canada dans les dernières années.
« On veut que les immigrants qui arrivent au Québec parlent français et soit actifs dans la société. C'est exactement le cas de Marithé qui enseignait le français aux étudiants provenant de l'international au Collège Bourget et à la Magie des mots. Elle est retraitée et payée par la France. Elle faisait du bénévolat à la Coop CSUR, au Marché Écolocal et à l'Hôpital Sainte-Justine avec les enfants malades. On comprend qu'il y a des critères à respecter pour les nouveaux arrivants, on ne s’explique pas que les parents, grands-parents, conjoints et conjointes soient inclus dans les mêmes quotas d’immigration que les réfugiés de guerre, climatiques ou politiques. Il y aura toujours des urgences mondiales et donc les réunifications familiales passeront toujours en dernier. Une réforme du système est nécessaire, mais on n’a plus le temps d’attendre. Si on ne se bat pas pour elle maintenant, on a peur qu'elle soit oubliée! », conclut Mme Dupaul.
Le 21 mai dernier, le gouvernement du Canada annonçait qu'une autre vague de tirages au sort se tiendrait parmi les candidatures déposées en 2020. « On croise les doigts», termine Tania.
Les intéressés à appuyer Tania Rampillon dans sa démarche en signant la pétition peuvent le faire via ce lien.
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