Les sujets ont été suivis jusqu'en 2019, c'est-à-dire pendant une période allant de 23 à 36 ans.
Les prématurés ont un risque de mortalité élevé jusqu'à 36 ans
Par La Presse Canadienne
Les bébés nés prématurément présentent un risque de mortalité plus élevé que les bébés nés à terme non seulement pendant leurs premières années de vie, mais jusqu'à l'âge de 36 ans, conclut une nouvelle étude à laquelle a participé un médecin de l'Hôpital de Montréal pour enfants.
Cela vient confirmer que la prématurité a un impact sur l'ensemble des organes et démontre que le risque de décès plus important ne se dissipe pas après les premières années de vie, a expliqué le docteur Marc Beltempo, un néonatologiste du Children.
«On voit que les prématurés ont un risque de décès presque trois fois plus élevé que les bébés à terme chez les 1 à 5 ans, et ça, c'est vraiment attribuable aux bébés qui sont extrêmement prématurés», a-t-il dit.
«Mais on voit aussi que les bébés prématurés qui survivent jusqu'à l'âge adulte ont quand même presque 30 % de plus de risques de décès que quelqu'un qui est né à terme.»
Les chercheurs ont analysé une cohorte de quelque cinq millions de naissances vivantes survenues au Canada entre 1983 et 1996. Un peu moins de 7 % de ces naissances étaient des naissances prématurées.
Les sujets ont été suivis jusqu'en 2019, c'est-à-dire pendant une période allant de 23 à 36 ans.
Les naissances prématurées ont été classées en sous-catégories d'âge gestationnel: 24-27 semaines, 28-31 semaines, 32-33 semaines et 34-36 semaines, et comparées aux naissances à terme, 37-41 semaines.
Les chercheurs ont constaté une association entre la prématurité et un risque accru de décès dans tous les groupes d'âge jusqu'à 36 ans, les risques les plus élevés étant observés de la naissance à la petite enfance (0-11 mois) et à la petite enfance (1-5 ans).
L'étude a également mis en évidence des risques accrus de mortalité liés à plusieurs causes telles que les troubles des systèmes respiratoire, circulatoire et digestif; les maladies du système nerveux, endocrinien et infectieux; les cancers; et les malformations congénitales.
Cela étant dit, a précisé le docteur Beltempo, le risque de décès entre 30 et 40 ans est d'emblée très faible.
«Une hausse d'environ 30 % peut avoir l'air importante sur papier, a-t-il dit, mais en même temps le risque de base n'est pas très élevé, mais c'est quand même une différence qui est importante.»
Les prématurés traîneront donc avec eux un risque plus élevé de différents problèmes de santé, a-t-il complété. Concrètement, au lieu de commencer le dépistage de l'hypertension à 40 ou 50 ans, il pourrait être pertinent de le faire plus tôt chez un patient né prématurément, a-t-il cité en exemple.
«Une étude en Suède a démontré que le risque cardiovasculaire est beaucoup plus élevé chez les anciens prématurés que chez les non prématurés, a rappelé le docteur Beltempo. Il faudrait donc qu'on adapte nos recommandations en ce qui concerne le risque cardiovasculaire pour intégrer le concept de prématurité.»
La prématurité devient alors un facteur de risque qui justifierait une stratégie de dépistage différente pour divers problèmes de santé, estime le chercheur.
Ce besoin est d'autant plus criant que, dans les années 1980, environ un bébé sur deux né après 24 semaines de grossesse décédait dans les jours après l'accouchement, a rappelé le docteur Beltempo. Aujourd'hui, on parle plutôt de 75 % des bébés nés à 24 semaines qui survivent jusqu'au moment de leur congé.
On retrouve donc dans la population de plus en plus d'adultes nés prématurément, et même très prématurément, dont la santé requiert une prise en charge particulière.
«Les premières cohortes de gens qui ont survécu après une naissance à 24 semaines datent des années 1980 ou 1990, a dit le docteur Beltempo. Il faut commencer à intégrer ça dans les recommandations de suivi. (Les prématurés) ne naissent pas handicapés, mais leurs organes sont immatures et il faut (tenir compte de) cette immaturité-là parce qu'il y a de bonnes stratégies de prévention pour leur donner une qualité de vie.»
Les conclusions de cette étude ont été publiées par le journal médical JAMA Network Open.
Jean-Benoit Legault, La Presse Canadienne
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