Trois municipalités de Soulanges seraient transférées dans le comté de Beauharnois
Redécoupage électoral au provincial: un scénario qui ne fait pas de sens pour les élus
Le redécoupage envisagé de la carte électorale provinciale pour la circonscription de Beauharnois, proposé par la Commission de la représentation électorale, est loin de faire l’unanimité auprès des élus dont les municipalités sont concernées. Entrevues avec Bernard Daoust, Peter Zytynsky, Andrée Brosseau et Miguel Lemieux.
Rappelons que le comté de Beauharnois, tel que proposé actuellement, comprendrait les Municipalités de Pointe-des-Cascades, Les Cèdres et Coteau-du-Lac qui font actuellement partie intégrante du comté de Soulanges. En contrepartie, celles de Saint-Étienne-de-Beauharnois, Saint-Louis-de-Gonzague et Saint-Stanislas-de-Kostka seraient, pour leur part, transférées dans le comté voisin de Huntingdon.
Une solution qui suscite l’incompréhension des maires et de la mairesse des Municipalités de Vaudreuil-Soulanges concernées.
« J’espère que nous ne serons pas intégrés à la circonscription de Beauharnois. Ce serait particulier parce que Les Cèdres est l’une des premières municipalités de Vaudreuil-Soulanges à avoir été créée à la fin des années 1 700 et au début 1 800. Au quotidien, on travaille des projets de concert avec la MRC de Vaudreuil-Soulanges. L’une de nos initiatives majeures communes est la protection du Canal Soulanges. Pour moi, cette solution découle d’une proposition basée uniquement sur les mathématiques. Dans les faits, elle n’a pas de sens et elle n’est pas basée sur notre réalité quotidienne», indique le maire Bernard Daoust qui occupe ce siège depuis novembre 2021.
En guise d’exemple, il précise que Les Cèdres n’a rien en commun avec les autres municipalités du comté de Beauharnois. « Nous sommes membres de la CMM et la majorité d’entre elles ne le sont pas. Nous devons nous arrimer aux schémas d’aménagement de la CMM et de la MRC, en plus d’être traversées par les autoroutes 20, 30 et 40. Le seul lien qui nous unit à Salaberry-de-Valleyfield est la navette fluviale. Si ce redécoupage se concrétise, il en découlerait un morcellement du territoire de la MRC de Vaudreuil-Soulanges qui est à la base même de notre identité. Ça aurait un impact sur tellement de choses », illustre-t-il.
Écouter sa population
De son côté, le maire de Pointe-des-Cascades, Peter Zytynsky, abondait dans le même sens lors de la soirée par la Commission de la représentation électorale tenue à l’Hôtel Moco de Salaberry-de-Valleyfield le lundi 6 novembre dernier.
« Pour ma part, en tant que maire d’une municipalité de 1800 âmes, c’est mon rôle d’écouter ma population. Que veulent mes citoyens? Rester dans la MRC de Vaudreuil-Soulanges et dans le comté actuel. Ils ne veulent pas de changement et optent pour le statu quo. La majorité de la population est constituée de personnes aînées et elle ne veut pas que l’on soit transféré dans le comté de Beauharnois et que l’on reste ensemble dans la communauté de la MRC de Vaudreuil-Soulanges. »
Il a précisé en terminant comprendre que la Commission de la représentation électorale se base sur des chiffres pour prendre des décisions. « Je suis certain que vous trouverez une autre solution. Comment disait Claude Reid, «if it’s not broken, don’t fix it.»
Une solution dénudée de sens
La mairesse de Coteau-du-Lac, Andrée Brosseau, le nouveau redécoupage ne fait pas de sens. « Nos municipalités (Les Cèdres, Pointe-des-Cascades et Coteau-du-Lac) sont liées par un projet commun: le Canal Soulanges. Sur le plan économique et touristique, on collabore souvent avec DEV Vaudreuil-Soulanges pour le développement de notre parc industriel. Sur le plan touristique aussi, on travaille de concert avec une ressource de cette région. On ferait quoi si on se retrouve dans le comté voisin? », questionne-t-elle.
Elle admet ne pas comprendre le bien-fondé de cette proposition. « Pointe-des-Cascades et Les Cèdres font partie de la CMM alors que ce n’est pas notre cas. La Municipalité des Coteaux va demeurer dans Soulanges, mais pas nous? Ce sera dur de faire avancer des projets communs si on doit avoir l’avoir de deux députés», estime-t-elle.
Un exercice à recommencer dans 4 ans?
Aussi rejoint pour commenter le dossier, le maire de Salaberry-de-Valleyfield, aussi préfet de la MRC de Beauharnois-Salaberry, Miguel Lemieux, en avait long à dire sur cette proposition insensée à ses yeux.
« Les perspectives de croissance sur lesquelles se fie la Commission de la représentation électorale pour bâtir le redécoupage sont erronées et ne tiennent pas compte de la réalité. Selon nos prévisions, nous aurons besoin de 59 nouvelles classes primaires sur le territoire de Salaberry-de-Valleyfield en 2027 alors qu’il faudrait en ajouter 31 à Beauharnois. En termes d’écoles, il faudrait construire 4 nouvelles écoles primaires pour répondre à la croissance anticipée. Une est actuellement en construction sur notre territoire, il en faudra donc trois supplémentaires. Or, on planifie le redécoupage en fonction de la population actuelle et non pas envisagée», confie-t-il.
Que pense-t-il de la proposition avancée par la Commission de la représentation électorale pour le comté de Beauharnois ? « On a eu beaucoup de contacts avec la Ville de Coteau-du-Lac depuis mon entrée en poste pour régler certains dossiers. Mais nos relations avec Pointe-des-Cascades et Les Cèdres sont faibles ou inexistantes. De plus, la Ville de Beauharnois et la Municipalité de Saint-Étienne-de-Beauharnois seraient désormais dans deux circonscriptions différentes, ce qui ne fait aucun sens tout comme celles de Saint-Louis-de-Gonzague et de Saint-Stanislas-de-Kostka avec lesquelles nous sommes lié par un pont», soutient-il.
Le premier magistrat est catégorique: si on lui imposait le découpage de sa Ville en deux, comme c’est le cas pour Vaudreuil-Dorion dans le nouveau scénario proposé par la Commission de la représentation électorale, il ne serait pas content. Pour lui, en proposant les changements envisagés pour le redécoupage de la carte électorale provinciale, on dénature le territoire actuel, en plus de ne pas régler le problème.
« Si la Commission procède aux changements souhaités, ce sera à recommencer dans quatre ans, car notre population ne sera plus la même. Pourquoi ne pas ajouter cinq circonscriptions de plus au Québec pour rééquilibrer le tout? Ça ne ferait pas une grande différence dans le budget du gouvernement provincial. On devrait mettre le dossier sur la glace pour étudier les autres possibilités et avoir un bon portrait de la situation», lance celui qui a commencé sa carrière comme attaché politique sur le palier provincial.
À son sens, ce changement alourdirait le quotidien des villes impliquées. « Nous aurions cinq députés, deux au fédéral, trois au provincial, deux centres de services scolaire et trois préfets. Pourtant, on pourrait parcourir la circonscription d’un bout à l’autre en 20 minutes. Pour la circonscription de Huntingdon, la proposition inclurait une partie de la Ville de Saint-Jean-sur-Richelieu. Jusqu’à Dundee, située à l’extrémité du comté, on peut compter 2h30 de voiture. Ce serait ingérable!»
En terminant, M. Lemieux précise qu’à son avis, « on devrait attendre avant de faire un redécoupage définitif en raison de la croissance en cours de la population régionale. Ça éviterait de recommencer dans quatre ans.»
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