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Une décision « organisationnelle »

Il perd sa concentration sport et est contraint de suivre un cours de cuisine

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5 octobre 2023
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Jessica Brisson
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Par Jessica Brisson, Éditrice adjointe

Suite à un changement «organisationnel» du Centre de services scolaire des Trois-Lacs, des étudiants en adaptation scolaire à l'École secondaire de la Cité-des-Jeunes, ont perdu leur concentration sports et sont contraints de suivre un cours de cuisine. Une situation que déplore fortement Marc Rivet.

« Toutes les études le disent, les personnes TDAH ont besoin de bouger. Je ne comprends pas pourquoi ils ont enlevé le sport pour mettre la cuisine. Ça me dépasse », confiait, à Néomédia, le père de Mathis, Marc Rivet.

Mathis Rivet, 14 ans, a été diagnostiqué avec un trouble du déficit de l'attention avec hyperactivité (TDAH) et de la dyslexie après avoir échoué sa deuxième année du primaire. Sur recommandation, il commence à prendre un médicament pour aider sa concentration.

Comme pour la majorité des personnes vivant avec un TDAH, Mathis canalise son énergie à travers le sport, notamment le hockey et le football. Parmi les autres recommandations du spécialiste, Mathis doit être en mesure de dépenser son surplus d'énergie dans le sport ou autres actions comme une marche au bureau des secrétaires et autres.

Mathis est aussi atteint d'eczéma sévère qui, en période de grand stress, lui inflige d'importantes douleurs. Afin de traiter sa condition, il doit recevoir des injections, chaque deux semaines, de Dupixen. Son eczéma est si sévère que durant la pandémie, il a dû être hospitalisé cinq jours durant lesquels il aura été momifié pour redonner une chance à sa peau de se reconstruire.

Le sport comme exutoire

Depuis le début de son parcours scolaire, Mathis évolue dans des classes adaptées dans lesquelles le nombre d'élèves est réduit et des outils technologiques et du support sont mis à sa disposition. 

« Après avoir échoué sa quatrième année, nous l'avons transféré à l'école des Étriers à Saint-Lazare, car les classes étaient mieux adaptées et il pouvait jouer au hockey dans l'équipe de l'école. Ça le motivait beaucoup et on voyait une amélioration de ses résultats scolaires. Vraiment ça fonctionnait », poursuit le père.

En plus d'évoluer au sein de l'équipe de l'école des Étriers, Mathis joue également au hockey civil dans une association locale.

Le passage à la grande école

Mathis aura dû, durant son parcours au primaire, reprendre deux années.

En 2021, Mathis fait son entrée au secondaire à la Cité-des-Jeunes, toujours en adaptation scolaire. 

« Il n'avait pas rattrapé tout son retard, mais il avait l'âge d'entrer au secondaire et vu son gabarit, il nous a été conseillé de faire le saut au secondaire. Nous avons assisté à une présentation du programme d'adaptation scolaire de la Cité-des-Jeunes et on nous avait indiqué que les élèves avaient le choix entre trois concentrations: sports, cuisine et arts plastiques. Comme il est écrit au dossier de Mathis qu'il a besoin de sports, la directrice de l'époque nous a dit de ne pas nous inquiéter que Mathis serait toujours en concentration sport tant et aussi longtemps qu'il serait en adaptation scolaire », poursuit M. Rivet.

Par conséquent, en plus de ses cours d'éducation physique, Mathis bénéficie de six heures d'activité physique, par cycle de neuf jours.

« L'an passé, Mathis a été invité à faire les essais pour le Sport-études à l'École secondaire des Sources. Malheureusement, comme l'école n'a pas de programme en adaptation scolaire, il n'a pas pu y être admis. On nous a quand même dit que la porte n'était pas totalement fermée s'il réussissait bien son passage au régulier ».

Une décision «organisationnelle»

Après deux ans où Mathis s'implique dans sa vie scolaire et sportive, le jeune adolescent a appris à la rentrée de 2023 que la concentration sport n'était plus offerte aux étudiants en adaptation scolaire. Seule la concentration cuisine sera offerte.

« Quand il est revenu de sa première journée, il m'a annoncé qu'il n'avait plus de concentration sport, mais qu'il allait être obligé de faire un cours de cuisine. Il était assez découragé, disons », de dire M. Rivet.

Voyant son fils se démotiver, le père de famille tente une approche auprès du Centre de services scolaire des Trois-Lacs. 

« On m'a dit que la concentration sport n'était plus offerte pour des raisons organisationnelles. J'ai eu plusieurs rencontres avec les enseignants et la direction. Malheureusement, je ne sens pas d'ouverture de leur part. Je suis d'accord qu'il est important de savoir cuisiner dans la vie, toutes les études le disent, mais les personnes TDAH ont besoin de bouger. Je ne comprends vraiment pas », déplore le père de famille.

De son côté, le CSSTL indique que c'est plutôt un nombre insuffisant de jeunes qui expliquerait le changement de concentration. 

« La concentration sport n’a pas été coupée au profit de la concentration cuisine. Lorsqu’il n’y a pas assez d’élèves pour offrir toutes les concentrations, nous prenons en compte le choix de la majorité et diverses contraintes d’organisation scolaire pour déterminer à quelle concentration les élèves auront accès. Les trois concentrations que nous offrons en adaptation scolaire permettent le développement des habiletés chez nos élèves. La cuisine est reconnue pour permettre de développer des habiletés et des stratégies qui aident nos élèves TDAH comme : la planification, l’organisation, le travail en équipe, le travail actif et de manipulation », indique par courriel Alexandra Desrochers, responsable des communications au CSSTL.

Marc Rivet a donc avisé l'école que pour des raisons organisationnelles, Mathis ne pourrait se rendre à son cours de cuisine. Les périodes durant lesquelles il devrait être en classe de cuisine, Mathis devra dépenser son énergie, avancer ses travaux scolaires et même bénéficier de tutorat. 

« C'est certain que je ne laisserais pas Mathis ne pas aller en classe pour qu'il joue aux jeux vidéos. Les six heures de cours de cuisine devront être utilisées pour bouger ou étudier. On m'a dit que s'il ne se présentait pas, il aurait un échec à son dossier et qu'il pourrait se voir couper son temps de jeu au sein de l'équipe de football ». 

Pas d'exemption sans billet du médecin

En raison de son eczéma sévère et de ses allergies alimentaires, Mathis Rivet a de nombreuses restrictions, rendant compliquée sa participation au cours de cuisine. 

« Mathis a des allergies aux poissons et aux fruits de mer. Il ne peut donc pas être en contact avec ces aliments. En plus, à cause de son eczéma et de ses injections de Dupixen, il ne peut pas se laver les mains fréquemment, ne peut pas être en contact avec du savon à vaisselle et ne doit surtout pas porter de gants de vaisselle », explique le père de l'adolescent.

Dans une communication venant, de la direction de l'établissement scolaire et dont Néomédia a eu copie, la directrice adjointe de l'adaptation scolaire, Mme Nadeau Cauchon, indique que malgré la condition particulière de Mathis, celui-ci « devra se laver les mains pour cuisiner. S’il suit les consignes de base, il ne devrait pas avoir à les relaver trop souvent. Pour la vaisselle, il ferait la tâche au même titre que les autres élèves, à moins d’un billet médical qui l’exempterait de cette tâche ».

« Nous allons rencontrer son spécialiste qui le suit en dermatologie à l'Hôpital Sainte-Justine, le 30 octobre prochain. J'essaie aussi d'avoir un rendez-vous avec un psychologue afin de gérer son anxiété face à cette situation depuis le début de l'année, mais les délais et disponibilités sont tellement compliqués », ajoute M. Rivet.

« Je ne sais pas si notre histoire aura une fin satisfaisante pour Mathis, mais si elle peut ouvrir la discussion et amener de nouvelles solutions pour les autres jeunes TDAH qui se voient privés de sports et bien, nous aurons au moins gagné ça », conclut Marc Rivet.
 

 

 

 

 

 

 

 

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