Agriculture
Les chutes de température font craindre le pire à des producteurs de la région
S’il n’est pas anormal à ce temps-ci de l’année de recevoir quelques flocons de neige, il n’en reste pas moins que pour les vignerons et les propriétaires de vergers, ce gel printanier sème l’inquiétude.
« Notre équipe est prête, à passer un bon 48 heures debout pour assurer la protection des vignes », lance, d’entrée de jeu, Sylvie Bissonnette, du Vignoble de Pomone à Coteau-du-Lac. Si son équipe est aux aguets, c’est pour protéger les quelque 53 000 plans de vignes du gel. « Si le bourgeon primaire gèle, on peut perdre 50% de nos raisins. C’est donc la moitié moins de vin. L’impact financier est énorme pour nous », ajoute la vigneronne.
En effet, puisqu’aucune assurance récolte n’existe pour soutenir les vignerons québécois, les pertes financières sont énormes pour les producteurs locaux. « Les autres producteurs de petits fruits comme les framboises ou les bleuets ont le support de la Financière agricole », poursuit la productrice qui estime que les pertes financières pourraient être de plusieurs centaines de milliers de dollars.
Ceci étant dit, la vigneronne se console en se disant que les bourgeons ne sont pas encore complètement ouverts, ils ont donc une certaine protection. « En ce moment, la neige est collante, alors ça nous aide un peu puisqu’elle va venir faire comme un isolant sur les bourgeons. Par contre, si le vent se lève, ça pourrait geler et faire éclater la cellule du bourgeon. C’est seulement dans quelques jours que nous allons savoir si ça débourbe comme il faut. »
Des variations de température sous surveillance
Puisque les températures varieront dans la journée, Sylvie Bissonnette et son équipe doivent assurer une surveillance de tous les instants. « Les bourgeons peuvent tolérer jusqu’à -2 degrés. Plus bas que ça, on peut commencer à paniquer. »
Selon la productrice, la période critique sera la nuit prochaine alors que le mercure descendra à -2 degrés. D’ailleurs afin de bien suivre les variations de température dans le vignoble, une vingtaine de thermomètres ont été installés ici et là.
Pour assurer la protection de ses vignes, le vignoble de Pomone a installé plusieurs dizaines de petits feux de paille tout autour du vignoble. Cette technique ancestrale, toujours utilisée en France, permet d’augmenter la température du sol. « Ce qu’il faut en fait, c’est s’assurer que la chaleur reste au sol. Donc avec la fumée du feu, on vient créer un nuage au-dessus du vignoble pour envelopper les vignes. La boucane va donc, faire une espèce de bulle qui va empêcher la chaleur des autres feux de bois, faits dans les allées du vignoble, de s’échapper », explique Sylvie Bissonnette.
Des risques pour les pommes aussi
Si le gel cause des soucis aux vignerons, il ne laisse pas indifférents les pomiculteurs comme Nathalie Gervais du Verger Labonté. « En ce moment, nous sommes encore à l’étape du prébouton rose c’est-à-dire que l’on commence à voir le bout de la fleur. Le gel est définitivement inquiétant, mais on surveille la situation de près », explique la propriétaire du verger qui ajoute « à -5 degrés, on estime à 10% le taux de mortalité. Si la température atteint -10 degrés, là on parle de 90%. »
Ceci étant dit, Mme Gervais ne croit pas avoir besoin de recourir à l’installation de feux pour réchauffer les plants, comme ce fût le cas il y a quelques années. « Évidemment, on va surveiller la température de près et tout faire pour sauver notre récolte », conclut-elle.