Dossier Boisé Rousseau : « Nous sommes déterminés à continuer de lutter. » - Carole Reed
Le groupe de citoyens luttant pour la protection du boisé Rousseau à Pincourt s'est rassemblé, le mardi 11 septembre, tout juste avant la séance du conseil municipal de la ville, afin de faire le point sur le dossier. D'ailleurs, une pétition comptant plus de 200 signatures a été remise aux membres du conseil municipal en début de séance.
Depuis maintenant près d'un an, le regroupement de résidents engagés se bat contre la Ville de Pincourt afin de tenter de sauver les quelque quatre hectares de terres humides et de boisé situés entre la 19e et la 22e avenue, dans un secteur appelé Place Rousseau.
Un promoteur immobilier et propriétaire du boisé, Samuel Ménard, projette d'y construire 45 maisons unifamiliales, ainsi la Place Rousseau deviendrait, la Place Pierre-Brunet.
Jamais la Ville de la Pincourt n'a été propriétaire de ce terrain qui a eu plusieurs propriétaires depuis les 40 dernières années. C'est autour de 1975, que le terrain a été divisé en lot, dans l'éventualité d'y construire des maisons. « Le terrain a été acheté dans les années 70, en fait, c'est à cet endroit qu'aurait dû se trouver le premier développement résidentiel de la Ville de Pincourt », expliquait en mai dernier M Yvan Cardinal, maire de la Ville de Pincourt.
« Pendant plus d'un an, la ville nous a dit qu'aucun permis n'avait été délivré et pourtant, le promoteur a été autorisé à utiliser un système d'égout déjà existant pour commencer à drainer le terrain dans la Rivière des Outaouais », explique Carole Reed, porte-parole du regroupement.
Considérant que le terrain est une propriété privée et que le promoteur a tout fait selon les règles, la Ville ne peut lui refuser la demande de permis.
Le groupe de citoyens a engagé une avocate pour pouvoir protéger la période de nidification des oiseaux locaux, sous la Loi de la protection des oiseaux migrateurs du Québec. Par conséquent, le développement a pu être retardé jusqu'en octobre 2018. « Ce fut une petite victoire pour nous, mais la bataille est loin d'être gagnée ,» poursuit Mme Reed.
Des études jugées incomplètes
En mai dernier, le maire de Pincourt, M. Yvan Cardinal mentionnait en entrevue à Néomédia que le promoteur, Samuel Ménard, avait obtenu toutes les autorisations nécessaires de la part du ministère de l'Environnement, suite à l'étude environnementale faite, aux frais de M. Ménard.
« Nous avons tenté d'obtenir, via la loi d'accès à l'information, une copie du rapport émis par l'entreprise G.R.E.B.E. inc, firme engagée par le promoteur Samuel Ménard. Puisque le document leur appartient, ils nous ont refusé l'accès. Toutefois, nous avons été en mesure d'obtenir une copie d'un mémo émis par le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs. »
Néomédia a également obtenu une copie de ce mémo dans lequel il est possible d'y lire :
Il est à noter que les résultats fauniques inscrits au rapport produit par la firme G.R.E.B.E. inc. sont basés sur une seule journée d'inventaire, soit le 26 avril 2016. Aucun protocole standardisé n'a été suivi lors des inventaires fauniques pour la faune aviaire, les reptiles, les amphibiens et les mammifères. Par exemple, pour les inventaires de couleuvres et d'anoures, des inventaires répartis sur au moins trois jours dans une période propice et dans des conditions météorologiques adéquates sont généralement exigés par le Ministère afin d'assurer une représentativité adéquate de l'échantillonnage. Dans le cas présent, aucune information n'est fournie à cet effet.
Le manque de rigueur dans les inventaires fauniques fait en sorte qu'il est difficile d'évaluer précisément les impacts sur la faune vu la faible représentativité des données. Par principe de précaution, on considère donc le milieu riche au niveau de la biodiversité. D'ailleurs, le fait qu'il s'agisse du dernier îlot boisé dans un environnement fortement urbanisé nous amène à le considérer comme un habitat de haute valeur écologique et important pour la faune, faute d'inventaire adéquat.
La destruction du couvert forestier et des milieux humides entrainera la perte complète de l'habitat pour toutes les espèces. Celles-ci ne pourront pas trouver refuge dans des habitats alternatifs en périphérie des travaux, car ils sont inexistants.
Jugeant l'étude biologique effectuée par la firme G.R.E.B.E inadéquate, le regroupement de citoyens a engagé, à ses frais, un biologiste afin de faire une étude indépendante et plus approfondie et pour être en mesure de répondre à la demande de la ville, soit de lui fournir plus d'information.
L'étude initiale a démontré qu'il existe une haute densité d'espèce dans la forêt, dont certaines qui peuvent être en péril. « Une étude d'une durée d'un an serait nécessaire afin de bien identifier les espèces », poursuit Mme Reed.
La Ville mène ses propres études
La Ville a mandaté la firme WSP pour mener une étude sur le terrain autant pour la flore que pour la faune. « Par souci de transparence, la Ville de Pincourt a décidé de prendre les services de M. Ricard de la firme WSP pour mener l'étude. Cette décision est justifiée par une rencontre entre les citoyens, le conseil municipal et le promoteur », explique M. Yvan Cardinal, maire de Pincourt.
M. Michel Perrier, directeur général à la Ville de Pincourt souligne que le rapport de l'étude devrait être remis à la Ville dans le courant du mois d'octobre. « Aucune entente entre la Ville et le promoteur n'a été prise, à ce jour. Nous allons attendre les résultats de l'étude avant de faire quoi que ce soit. »
Une autre étude a été menée quant à elle par l'entreprise SNC-Lavalin et visait à mesurer l'impact qu'aurait l'ajout de 45 maisons, sur la circulation. « L'étude s'est déroulée tout l'été, à partir du mois de mai. Elle est maintenant terminée. L'équipe de SNC-Lavalin devrait présenter les résultats de l'enquête aux membres du conseil municipal, dans les semaines à venir », explique M. Perrier.
Des revendications claires
« Faisons-nous bien comprendre, on ne se bat seulement que pour sauver des espèces d'oiseaux et des couleuvres brunes. Nous nous battons pour protéger un écosystème qui est considéré comme un trésor écologique, un secteur sensible au niveau faunique », souligne Mme Reed.
Le groupe Sauvez la Forest Rousseau espère obtenir un sursis afin de terminer l'enquête environnementale. Huit mois sont encore nécessaires afin de mener à terme l'étude. « Finalement, nous souhaitons également protéger notre ville contre le surdéveloppement. Nous faisons déjà face à un problème de circulation, et ce c'est sans compter le système d'égout qui est incapable de soutenir la population actuelle. »
« Nous sommes déterminés à continuer de lutter », conclut Mme Reed.
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