La récolte de l’eau de Pâques
Une tradition pascale bien de chez nous

Par Félix Sabourin, Journaliste
Si cette tradition est aujourd’hui méconnue pour beaucoup, elle continue pourtant de vivre dans plusieurs familles. Dans le folklore québécois, elle demeure un rituel pascal incontournable. Pour les non-initiés, l’eau doit être récoltée à contre-courant, dans une source d’eau naturelle, quelques instants avant le lever du soleil le dimanche de Pâques.
Cette eau avait, disait-on, des propriétés miraculeuses. On la recueillait autrefois pour ses « pouvoirs de guérison et sa capacité à protéger contre les catastrophes. »
Certains en aspergeaient leur maison ou leur bâtiment de ferme à l’aide d’un rameau béni le dimanche des Rameaux, espérant ainsi éloigner les mauvais esprits et assurer de bonnes récoltes.
Les origines de cette tradition sont quelque peu nébuleuses, mais selon certaines sources, elle nous viendrait d’Europe, transmise par les colons français du temps de la Nouvelle-France. Avec les siècles, la tradition s’est perpétuée et elle est longtemps restée ancrée dans le folklore populaire québécois.
L’art de bouder une tradition
Depuis aussi loin que je me souvienne, la récolte de l’eau de Pâques a toujours été présente dans ma famille. À de nombreuses reprises, alors que je n’étais qu’un enfant, mes parents réveillaient mon frère et moi vers 4 h 30 du matin. C’était l’heure d’aller chercher l’eau de Pâques.
Je dois avouer que j’ai mis beaucoup de temps à comprendre pourquoi on se levait pour aller puiser de l’eau dans un ruisseau qui, à mes yeux d’enfant, n’avait rien de spécial. Et je mentirais si je disais que j’avais du plaisir à être tiré de mon lit en pleine nuit.
Je mentirais aussi si je disais que j’y suis allé chaque année. Il m’est souvent arrivé de passer tout droit, ou de simplement refuser d’y aller, trouvant ridicule l’idée de chercher une eau soi-disant « magique ».
Qu’en est-il aujourd’hui ?
Avec le temps, j’ai fini par y prendre goût. En devenant adulte, j’ai compris le vrai secret de la récolte de l’eau de Pâques.
Non, ce n’est pas d'aller chercher de l’eau magique capable de « guérir le mâlin », comme diraient mon père et mon oncle. Cependant, il y a quelques semaines, j’ai été témoin d’une « guérison » grâce à l’eau de Pâques, et je dois dire que, depuis, j’ai un peu plus la foi...
Le véritable secret, c’est le temps passé avec mes proches. C’est le fait que, chaque année, on se retrouve au sanctuaire de Lourde pour cette tradition. C’est prendre une bonne lampée d’eau fraîchement récoltée tout en essayant de ne pas tomber dans le ruisseau glacé.
C’est de monter jusqu’au sommet du mont Rigaud, à la même place que d’habitude, pour observer le lever du soleil, en se lançant les mêmes répliques de la série Le temps d’une paix.
C’est tout cela et bien d’autres choses encore. Ce sont ces souvenirs, ces moments partagés, que l’on se remémore d’année en année.
Une chose est sûre : aujourd’hui, je suis profondément reconnaissant envers mes parents pour ces réveils forcés de mon enfance. J’ai des souvenirs qui vont me durer toute la vie, sans compter ceux qui continueront de se forger avec le temps.
Et une autre chose est tout aussi certaine, je recommande à quiconque d’essayer cette expérience au moins une fois. Ce pourrait être le début d’une nouvelle tradition, ou bien une expérience à ne plus jamais revivre. Pour le savoir, il va falloir l’essayer.
Pour partager votre opinion vous devez être connecté.