Son talent connait un rayonnement international
Une enseignante du Cégep de Valleyfield expose à Venise
Ce samedi 12 avril, l'Île de la Giudecca, à Venise, en Italie, sera l’hôte du vernissage de la toute première édition de l’exposition CREA OPEN 2025 qui met en vedette le talent de 39 artistes sélectionnés parmi 4 013 et issus de 104 pays. Parmi eux, on retrouve Natascha Niederstrass, enseignante en arts visuels au Cégep de Valleyfield avec qui Néomédia a pu s’entretenir à quelques jours du vernissage de cette exposition d’envergure.
L'artiste y présente l’oeuvre Incursione clandestina issue du corpus RUINENLUST constitué de plusieurs oeuvres. Cet ensemble photographique témoigne bien de la pratique de l’artiste qui aime mettre à profit la vidéo, la photographe et l’installation.
« En tant qu’artiste en arts visuels, on reçoit régulièrement des appels de projets ou de dossiers pour participer à plusieurs expositions de ce type. J’ai donc décidé de tenter ma chance et de soumettre un dossier de candidatures et ça a fonctionné, j’ai été sélectionné. Malheureusement, je ne pourrai pas être présente au vernissage en personne, mais j’y serai en pensée. Les oeuvres seront exposées sur place jusqu’au dimanche 27 avril prochain. C’est assez court comme exposition si on tient compte de son envergure », résume-t-elle au bout du fil à un peu plus de 48 heures du vernissage.
Crédit photo : Chantal l’Heureux
Comme dans toute compétition, des prix seront décernés aux artistes participants à la Créa Open. L’identité des gagnants du premier, deuxième et troisième prix sera annoncé ce samedi lors du vernissage.
« L’artiste qui remportera le premier prix aura le privilège d’être au coeur d’une exposition solo au même endroit à une date ultérieure. Le deuxième prix permettra à celui qui mettra la main dessus d’être en résidence de création à Turin, en Italie. Le troisième prix est une surprise et sera annoncé ce samedi.»
Ayant des origines italiennes, Natascha Niederstrass, expose pour la première fois dans ce pays d’Europe. Toutefois, il ne s’agit pas d’une première expérience internationale pour elle. « J’expose jusqu’à ce dimanche 13 avril, mes oeuvres à Paris, au Musée d’Art contemporain du Val-de-Marne aux côtés de 80 artistes ayant acquis une renommée internationale tels que Sophie Calle et Pierre Huyghe. L’exposition « Faits divers » qui réunit non moins de 80 artistes, de différents horizons et pratiques formelles a reçu le label d'intérêt national (EIN) de la part du Ministère de la Culture de France», ajoute-t-elle.
Une oeuvre qui fait partie intégrante d’un corpus
La photo Incursione clandestina présentée à Venise fût également présentée du 28 septembre au 9 novembre 2024 lors d’une exposition solo intitulée RUINENLUST à la Galerie Patrick Mikhail de Montréal. « La photo a été prise sur l’île inhabitée de Poveglia, située dans la lagune vénitienne, ayant récemment acquis une renommée mondiale en tant qu'île la plus hantée du monde. Je me suis rendue là pour la première fois en février 2020, soit tout juste avant la pandémie et la fermeture des frontières pour un premier repérage. J'ai donc dû, à cause de ce contexte, mettre le projet sur pause. En janvier 2024, je l'ai relancé avec le résultat qu'on connaît aujourd'hui. »
En Italie, l'Île de Poveglia est au centre de nombreuses légendes. Au XVIe siècle, l'île fut transformée en lazaret qui par définition est un établissement où s'effectue le contrôle sanitaire, l'isolement des voyageurs susceptibles de maladies contagieuses. C'est là que les navires, suspectés de cas de peste, arrêtaient pour que l'équipage y reste en quarantaine. Au fil des ans, de nombreuses rumeurs sont nées autour de cet îlot de terre. Par exemple, des légendes locales indiquent que plus de 160 000 personnes y sont enterrées dans des grandes fosses creusées et que d'imposants bûchers y avaient été installées afin de brûler les corps.
« Ayant des racines italiennes et avec ma mère qui est née à 1h30 de Venise, je m'intéresse à l'histoire de cette région depuis longtemps. J'ai toujours voulu comprendre pourquoi l’île de Poveglia avait été abandonnée au fil du temps.Grâce à mes recherches sur celle-ci, j'ai pu distinguer le vrai du faux et comprendre comment cette île qui a joué un rôle important dans l'histoire a basculé dans le domaine de la légende et du mythe. Je ne cache pas que ça été difficile de trouver quelqu'un qui accepte de m'y conduire. L'endroit a cessé d'accueillir des gens depuis 1968 et c'est vraiment en décrépitude. J'essayais d'y mettre les pieds depuis 2015, et c'est finalement, grâce à la collaboration d'un historien danois que j'ai pu le faire à deux reprises», raconte-t-elle en terminant.
C'est donc un compte-rendu de sa visite sur cette île abandonnée qui est au coeur du travail présenté dans le cadre de l'exposition CREA OPEN 2025. Notons que l'artiste a reçu une mention spéciale du jury de Crea Open pour la qualité de sa recherche.
L'exposition n'étant plus en cours, on peut cependant voir l'oeuvre exposée par la Galerie Patrick Mikhail à la Foire d’art Contemporain PLURAL, qui se tient au Grand Quai du Vieux Port de Montréal jusqu'au 13 avril 2025.
Voici quelques extraits de la description de cette exposition qui figure sur le site Internet du galeriste:
La nouvelle exposition de Natascha Niederstrass aborde cette fascination pour la décomposition et le morbide tout en faisant émerger un imaginaire post-romantique de l'espace en ruine en relation avec son histoire. Ce travail s’intéresse plus spécifiquement à l'île inhabitée de Poveglia, située dans la lagune vénitienne, ayant récemment acquis une renommée mondiale en tant qu'"île la plus hantée du monde".
Niederstrass examine également par le biais de ce corpus, la manière dont ce récit a rebondi sur l'île, attirant les adeptes du paranormal. Derrière un récit apparemment trivial, l’état d’entre-deux ou transitoire des fantômes (conçus comme des objets culturels capables d'activer une sphère émotionnelle qui va au-delà de la compréhension rationnelle des lieux) permet de reconceptualiser les discontinuités du temps et de l'espace, la déconnexion entre les cultures vernaculaires et académiques et les dichotomies classiques attribuées aux espaces insulaires. Le cas de Poveglia montre comment les fantômes peuvent façonner la manière dont les récits sont racontés et révèle comment notre désir de mythifier le réel transcende les faits historiques.
Natascha Niederstrass
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