Marika Sabourin relate une épreuve vécue dans son premier livre
Écrire un livre pour se libérer, mieux avancer et livrer un message d'espoir
Malgré la difficile épreuve qu’elle a vécue alors qu’elle n’était âgée que de 12 ans, Marika Sabourin a trouvé le courage de la raconter sur papier dans un récit autobiographique intitulé Les yeux noirs. Entrevue avec la citoyenne de Rigaud qui fait preuve de résilience et de courage.
Dans ce livre de poche de 80 pages, Marika raconte la pire épreuve de sa vie: les abus sexuels subis par son père alors qu’elle n’était âgée que de 12 ans. « Je ne suis pas une lectrice dans la vie de tous les jours. Je voulais écrire un livre depuis plusieurs années, mais je ne voulais rien de trop élaborer pour que tout le monde, y compris ma famille qui n’est pas composée de gros lecteurs, puisse le lire. Même si le livre n’est pas volumineux, je ne passe pas par quatre chemins et j’entre dans les détails», raconte la jeune femme aujourd’hui âgée de 25 ans.
Au début des agressions, Marika est droguée par son père, si bien qu’elle n’a pas conscience de tous les événements. « Les faits se sont déroulés sur une période d’un an. Rapidement, je me suis rendu compte que je ne me rappelais pas de tout et j’ai arrêté, un moment donné, de prendre ce qu’il me donnait à boire et à manger. Par la suite, il me forçait à les absorber en me faisant du chantage», ajoute-t-elle.
Depuis toujours, Marika adore les chevaux. À l’époque des faits, elle faisait de la compétition. « Je voulais un bon cheval et il me disait que je l’aurais si je mangeais et que je buvais ce qu’il me donnait. Il a fini par l’acheter et j’ai arrêté de prendre ce qu’il me donnait. Mais je ne l’ai pas dénoncé tout de suite, ç’a m’a pris cinq ans avant de le faire, car je n’étais pas prête », confie-t-elle.
Dénoncer pour se libérer
Cinq ans plus tard, Marika est en relation avec un garçon à qui elle a confié son secret. C’est la seule personne de son entourage avec qui elle partage son vécu à cette époque. Leur relation bat de l’aile et c’est là qu’elle décide de porter plainte contre son père officiellement. « Depuis les événements, je cachais qui j’étais vraiment et ce que j’avais vécu. Puis, un jour, j’ai décidé que j’étais prête et je suis allée au poste de police sans le dire à personne sauf à mon amoureux de l’époque. C’est lui qui a prévenu ma mère d’ailleurs et ç'a été un choc pour elle.»
Ce n’est qu’au poste de police, assise en face d’un agent, que la jeune femme réalise pleinement les événements qui lui sont arrivés. Au moment de la dénonciation des faits, son père est incarcéré pour un autre délit, c'est ce qui incite d'ailleurs la jeune femme à aller de l'avant dans sa démarche. « Mon père m’incitait à le dénoncer en me disant que ça allait me libérer et il n’avait pas tort. Une fois que je l’ai écouté, il a été arrêté et a subi un procès pour lequel il a plaidé coupable de tous les gestes reprochés à mon encontre. Il a écopé d’une peine de huit ans de prison en 2017. En théorie, il devrait être libéré l’an prochain si tout va comme prévu», mentionne-t-elle.
En dénonçant les abus dont elle a été victime, Marika s’est libérée et a aussitôt obtenu le support inconditionnel de ses proches. « Il ne faut pas avoir peur d’en parler si on vit une situation semblable, ne serait-ce que pour se délivrer soi-même. On ne pense pas que ça peut arriver à quelqu’un près de nous, mais c’est plus commun qu’on le croit. Depuis la sortie du livre, je reçois plusieurs témoignages en ce sens, autant de victimes que de leurs proches.»
Et comment sa famille paternelle a-t-elle réagi suite à sa dénonciation? « Tout le monde a été derrière moi dès le début. On n'a jamais remis en question ma version. Mon père a aussi admis les faits devant la Cour. Tout le monde m’a soutenue et crue en moi dès le départ. Ma grand-mère paternelle est très supportrice et est heureuse de cette démarche. C’est sûr que le livre a été une surprise, mais pas tant parce que j’ai toujours voulu écrire. Je sais que mon père est au courant de ma démarche, mais je ne sais pas s’il l’a lu », confie-t-elle.
Lors du processus de rédaction de son livre, Marika a pu compter sur le soutien de sa tante Martine, la soeur de sa maman qui est enseignante. « Elle m’a aidé avec l’orthographe. Puis, elle avait un contact dans une maison d’édition et nous a mis en relation. J’ai alors envoyé mon brouillon papier à la personne et elle m’a dit qu’elle voulait embarquer dans le projet et que je pouvais commencer à le taper à l’ordinateur (rires). Ce n’est que lorsque j’ai rédigé la quatrième de couverture avec ma photo et la description de mon livre que je l’ai montré à ma famille. Je n’ai eu aucun commentaire négatif, que du soutien et de l’amour.»
Un message d’espoir
Même si le livre relate en détail les agressions subies par Marika, il est aussi porteur d’espoir pour les victimes et leurs proches. « J’essaie de ne pas laisser ces événements gâcher ma vie au quotidien. Pour moi, ils appartiennent au passé et j’essaie de me concentrer sur ma vie présente avec ma fille et mon amoureux. J’ai pardonné à mon père et ma grand-mère a encore des contacts avec lui et c’est correct. J’avance et j’espère que les gens qui liront mon livre pourront le faire aussi.»
Est-elle à l’aise que ses enfants découvrent un jour son histoire en la lisant dans son livre ? « Oui, je suis un grand livre ouvert avec mes proches. J’ai vendu beaucoup d’exemplaires à des parents et ils m’ont dit que c’était une belle porte d’entrée pour discuter de ce sujet avec leurs enfants et ados et adresser la discussion. »
Un second roman?
Pour l’heure, Marika n’a pas de projet d’écriture pour un second roman. Par contre, très bientôt, la jeune femme aimerait approcher un Centre d’aide aux victimes d’actes criminels (CAVAC) afin de proposer de faire des conférences sur son livre et sa vie. « Il n’y a pas de recette parfaite pour passer au travers d’une épreuve comme celle que j’ai vécu. Mais si je peux faire ma part en les aidant à mieux vivre avec ça, je serais heureuse.»
Pour les intéressés à se procurer un exemplaire de son premier Les Yeux noirs, il est en vente au coût de 20$ à la station-service Crevier de Rigaud située au 61 rue Saint-Jean-Baptiste. Sinon, on peut aussi contacter la jeune autrice sur Facebook afin d’obtenir un exemplaire en livraison au coût de 25 $ partout au Québec.
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