Le Québec réussit à retenir les immigrants, mais pas les provinces de l'Atlantique
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Par La Presse Canadienne, 2024
MONTRÉAL — Les immigrants choisissent de plus en plus de rester au Québec, selon un nouveau rapport de Statistique Canada, mais ce n’est pas le cas dans les provinces de l’Atlantique, qui continuent de perdre de nouveaux arrivants au profit du reste du pays.
De tous les immigrants admis au Québec en 2021, près de 94 % d’entre eux étaient toujours dans la province un an plus tard, soit une hausse de 8,8 % par rapport à 2018. Les plus fortes augmentations de nouveaux arrivants choisissant de rester au Québec ont été observées dans la catégorie économique, selon le rapport de Statistique Canada.
Catherine Xhardez, professeure adjointe de science politique à l’Université de Montréal, affirme qu'il s'agit d'une bonne nouvelle pour le Québec, car, contrairement au reste du pays, le gouvernement provincial contrôle son flux d’immigration économique.
«C’est aussi une question de concurrence. On veut que les meilleurs et les plus brillants restent parce que, si on investit en eux, si on les sélectionne, on ne veut pas qu’ils aillent en Ontario», déclare Mme Xhardez, qui dirige également l’Équipe de recherche sur l’immigration au Québec et ailleurs (ÉRIQA).
Il y a quelques décennies, lorsque le taux de chômage au Québec était bien plus élevé que le taux actuel de 5,7 %, les immigrants quittaient la province à un rythme beaucoup plus élevé, souligne Mme Xhardez, ajoutant que les possibilités d’emploi et les programmes sociaux sont essentiels pour retenir les nouveaux arrivants.
«Cela dépend vraiment des conditions de vie et des possibilités offertes aux immigrants. C’est le facteur le plus important pour les personnes qui déménagent d’une province à une autre.»
Les dernières données, datant déjà de quelques années, Mme Xhardez admet que les changements dans le climat politique du Québec – le gouvernement accuse régulièrement l’immigration de menacer la langue française – et la récente décision de la province de geler plusieurs programmes d’immigration pourraient avoir un impact sur les tendances futures en matière d’immigration. De telles mesures pourraient avoir pour effet de faire fuir les immigrants, selon elle, d’autant plus que d’autres provinces ciblent également les francophones.
Le Québec n’est pas la seule province à avoir des taux de rétention des immigrants élevés. L’Ontario est en tête: 94,6 % des nouveaux arrivants admis dans la province en 2021 y étaient toujours un an plus tard. En Colombie-Britannique, ce taux était de 91,7 %, comparativement à 89,5 % en Alberta.
Cependant, le Canada atlantique offre un contraste frappant. Les quatre provinces ont enregistré une baisse des taux de rétention sur un an des immigrants admis en 2020 par rapport à 2021. Elle est de 14,1 % à Terre-Neuve-et-Labrador, de 11,7 % en Nouvelle-Écosse, de 8,9 % à l'Île-du-Prince-Édouard et de 2,2 % au Nouveau-Brunswick.
«Les immigrants qui ont quitté les provinces de l'Atlantique étaient les plus susceptibles de s'installer en Ontario», indique le rapport.
«Un impact positif pour le Canada atlantique»
Par ailleurs, Statistique Canada a également examiné les taux de rétention sur cinq ans, analysant combien d'immigrants admis au pays entre 2013 et 2017 étaient toujours dans leur province d’accueil cinq ans plus tard.
«Parmi les immigrants admis de 2013 à 2017, ceux qui avaient l'intention de vivre en Ontario, en Colombie-Britannique, en Alberta et au Québec étaient les plus susceptibles de résider dans la même province cinq ans après leur admission», peut-on lire dans le rapport.
Les taux de rétention sur cinq ans étaient les plus élevés en Ontario, à 93,5 %, en Colombie-Britannique, à 87,5 %, en Alberta, à 87,3 %, et au Québec, à 79,7 %.
Une fois de plus, les taux de rétention au Canada atlantique sont parmi les plus bas au pays. En Nouvelle-Écosse, 61,7 % des immigrants admis en 2013 étaient toujours dans la province cinq ans plus tard. Ce taux est passé à 62,1 % en 2017. Au Nouveau-Brunswick, 51,7 % des immigrants admis en 2017 étaient toujours dans la province cinq ans plus tard, une augmentation de 3,9 % par rapport à 2013.
Pour la cohorte d'immigrants arrivés en 2017, 45,6 % d'entre eux étaient toujours à Terre-Neuve-et-Labrador cinq ans plus tard, et 25,7 % étaient toujours à l'Île-du-Prince-Édouard.
Ces chiffres ne surprennent pas Tony Fang, professeur d'économie à l'Université Memorial de Terre-Neuve. À son avis, «le manque d'emplois intéressants» est en cause. «C’est la principale raison pour laquelle ils ne restent pas dans la région», a-t-il déclaré en entrevue lundi.
«La deuxième raison est le lien familial. La troisième raison est le manque de soutien communautaire», a-t-il affirmé. Selon lui, les communautés très soudées dans ces provinces peuvent être difficiles pour les nouveaux arrivants, qui ont parfois l’impression d’être des étrangers.
Les nouveaux arrivants peuvent plus facilement retrouver leurs communautés culturelles et leurs familles dans les grandes villes comme Toronto, Montréal et Vancouver, a souligné M. Fang, ajoutant que le Canada atlantique aurait intérêt à accepter un plus grand nombre d’immigrants à la fois, comme Terre-Neuve-et-Labrador l’a fait avec les réfugiés ukrainiens et syriens.
Même si l’immigration dépasse peut-être l'offre de logements et de services sociaux, la région des Maritimes a désespérément besoin des nouveaux arrivants pour stimuler son développement économique, a fait valoir M. Fang.
«Nous avons la population la plus âgée. Nous avons les déficits démographiques de main-d’œuvre les plus graves. Nous avons des pénuries de main-d’œuvre qualifiée plus graves, donc l’immigration a certainement un impact positif pour le Canada atlantique.»
Joe Bongiorno, La Presse Canadienne