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La mort mystérieuse de 350 éléphants est expliquée

durée 15h15
3 décembre 2024
La Presse Canadienne, 2024
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Temps de lecture   :  

3 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

MONTRÉAL — Des scientifiques croient avoir élucidé le mystère entourant la mort de 350 éléphants en 2020 au Botswana, grâce à l’analyse d’images satellites. Au banc des accusés: la prolifération de cyanobactéries causée par les changements climatiques, selon un article publié dans la revue Science of the Total Environment.

Au début de l’été 2020, sur une période de quelques semaines, des éléphants de tous âges avaient été frappés par le même mal.

Ces pachydermes marchaient en rond pendant des heures avant de s’effondrer, à différents endroits dans le delta de l'Okavango, au nord du Botswana.

Près de 350 carcasses d’éléphants avaient été retrouvées.

Dans un échange de courriels avec l’Associated Press à l’époque, Mark Hiley, le directeur du groupe de conservation National Park Rescue au Botswana, avait qualifié l’événement «d’une des plus grandes catastrophes du siècle» pour les éléphants.

Plusieurs théories circulaient, incluant la COVID-19, la maladie du charbon ou le virus de l'encéphalomyocardite.

À l’automne 2020, le gouvernement du Botswana avait conclu que des toxines produites par les cyanobactéries contenues dans les points d’eau étaient responsables de la mort des éléphants.

Mais les autorités n'étaient pas en mesure de fournir des données solides.

Absence d’échantillon

Comme les carcasses de pachydermes avaient été retrouvées dans un lieu isolé, difficile d’accès, pendant une pandémie durant laquelle les restrictions empêchaient certains déplacements, il avait été très difficile d’obtenir des échantillons sur le terrain, ont rappelé les auteurs d'une étude publiée il y a quelques jours dans la revue Science of the Total Environment.

«Aucun échantillon complet d'eau et de tissus in situ contemporain de la mortalité n'avait été collecté», ont écrit les chercheurs.

En l'absence de données solides, les scientifiques ont donc décidé d’explorer une «stratégie alternative» pour comprendre et élucider ce qui s'était passé.

Ils ont ainsi utilisé des données satellites pour analyser la répartition des carcasses par rapport aux points d’eau qui contenaient des cyanobactéries, aussi appelées algues bleu-vert.

Grâce à des photos aériennes de l’époque, les scientifiques savaient exactement où les carcasses se trouvaient. Ils ont croisé ces informations avec une analyse des plans d’eau.

Au moyen de différentes données provenant d’images satellites, dont l'indice NDVI ou Normalized Difference Vegetative Index, les chercheurs ont réussi à estimer la quantité de cyanobactéries que pouvaient contenir les plans d’eau à l’été 2020.

Près de 3000 plans d’eau ont été analysés et l’étude a conclu que les concentrations élevées de carcasses d’éléphants se trouvaient près des points d’eau où l’on observait une prolifération importante de cyanobactéries en 2020.

Une vingtaine de ces points d’eau ont montré une prolifération de cyanobactéries «sans précédent» pendant «la période de mortalité massive».

Maladies induites par le climat

Les chercheurs croient que le passage de la sécheresse de 2019 au Botswana, l’une des pires sécheresses jamais enregistrées dans cette région, à une période de pluie particulièrement abondante en 2020, aurait déclenché une «croissance extrême» de cyanobactéries dans les pans d’eau où s’abreuvaient les éléphants.

En moyenne, les éléphants auraient marché 16,5 kilomètres après avoir bu l’eau contenant des toxines et ils seraient morts 33 heures après avoir été contaminés.

Les auteurs de l’article mettent en garde que les changements climatiques pourraient provoquer d’autres catastrophes du genre et soulignent «la tendance alarmante des maladies soudaines induites par le climat qui affectent les grands ongulés».

Les ongulés sont des mammifères herbivores qui sont pourvus de sabots.

L’étude souligne également qu’il est possible que d’autres espèces, plus petites, aient vécu le même sort que les éléphants pendant cette période dans cette région, mais qu’elles soient passées inaperçues.

Un nouveau cadre pour les études de mortalité massive

Les chercheurs sont d'avis que les techniques utilisées au cours de l’étude, comme l'analyse spatiale et la télédétection, fournissent un nouveau cadre pour étudier les mortalités massives de mammifères.

«L’intégration de l’analyse spatiale, de la télédétection et de l’évaluation écohydrologique permet non seulement de contourner les défis logistiques, mais fournit également un modèle évolutif pour étudier les événements de mortalité de la faune dans des régions tout aussi inaccessibles, où les méthodes traditionnelles basées sur le terrain peuvent être peu pratiques ou impossibles», peut-on lire dans la conclusion de l’étude.

Des chercheurs de l’Université du Botswana, du Musée d’histoire naturelle de Londres, de l’Université Queen’s de Belfast et du Laboratoire marin de Plymouth ont participé à l’étude.

Stéphane Blais, La Presse Canadienne

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