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L'Aga Khan, chef spirituel des musulmans ismaéliens, s'éteint à 88 ans

durée 18h22
4 février 2025
La Presse Canadienne, 2024
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Temps de lecture   :  

4 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

L’Aga Khan, qui est devenu à 20 ans le chef spirituel de millions de musulmans ismaéliens du monde alors qu’il était étudiant à Harvard et qui a utilisé des milliards de dollars de dîmes pour financer la construction de maisons, d’hôpitaux et d’écoles dans les pays en développement, est décédé. Il avait 88 ans.

Sa Fondation Aga Khan et la communauté religieuse ismaélienne ont annoncé sur leurs sites web que Son Altesse le prince Karim Al-Hussaini, l’Aga Khan IV et 49e imam héréditaire des musulmans chiites ismaéliens, est décédé mardi au Portugal entouré de sa famille.

Ils ont indiqué qu’une annonce concernant son successeur sera faite plus tard.

Au Canada, son nom est synonyme de scandale depuis que le commissariat fédéral aux conflits d'intérêts et à l'éthique a jugé que les vacances du premier ministre Justin Trudeau sur une île privée lui appartenant violaient la loi.

Le commissaire à l'éthique avait déclaré que M. Trudeau avait enfreint les règles en acceptant un cadeau susceptible d'influencer les décisions du gouvernement. M. Trudeau s'était rendu sur son île des Bahamas pour les vacances des fêtes en 2016. Ce voyage de huit jours a coûté 215 000 $ d'argent des contribuables. La même année, la Fondation Aga Khan Canada avait reçu un financement à hauteur de plus de 50 millions $.

M. Trudeau a rendu hommage à l'Aga Khan mardi, le décrivant comme un leader compatissant qui manquera profondément à des gens partout dans le monde.

L'Aga Khan a reçu la citoyenneté canadienne à titre honorifique en 2009.

Le chef des ismaéliens

Considéré par ses disciples comme un descendant direct du prophète Mahomet, le prince Karim Aga Khan IV était étudiant lorsque son grand-père a laissé tomber son père comme successeur à la tête de la diaspora des musulmans chiites ismaéliens, affirmant que ses disciples devraient être dirigés par un jeune homme «qui a été élevé au milieu de la nouvelle ère».

Au fil des décennies, l’Aga Khan est devenu un magnat des affaires et un philanthrope, oscillant entre le spirituel et le profane, et les mêlant avec aisance.

Considéré comme un chef d’État, l’Aga Khan a reçu le titre de «Son Altesse» de la reine Élisabeth II en juillet 1957, deux semaines après que son grand-père, l’Aga Khan III, l’a inopinément désigné héritier de la dynastie familiale vieille de 1300 ans, faisant de lui le chef de la secte musulmane ismaélienne.

Il est devenu l’Aga Khan IV le 19 octobre 1957, à Dar es-Salaam, en Tanzanie, à l'endroit même où son grand-père avait reçu en cadeau de ses fidèles son poids égal en diamants.

L'Aga Khan a quitté Harvard pour être aux côtés de son grand-père malade et est retourné à l’école 18 mois plus tard avec un entourage et un sens profond des responsabilités.

«J’étais un étudiant qui savait ce que serait son travail pour le reste de sa vie», a-t-il déclaré dans une entrevue accordée au magazine Vanity Fair, en 2012. «Je ne pense pas que quiconque dans ma situation aurait été préparé.»

Un vaste réseau philanthropique

Le Réseau Aga Khan de développement, sa principale organisation philanthropique, s’occupait majoritairement de questions de soins de santé, de logement, d’éducation et de développement économique rural.

Un réseau d’hôpitaux portant son nom est disséminé dans des pays où les soins de santé manquaient aux plus pauvres, notamment au Bangladesh, au Tadjikistan et en Afghanistan, où il a dépensé des dizaines de millions de dollars pour le développement des économies locales.

Son sens de la construction et du design l’a conduit à créer un prix d’architecture et des programmes d’architecture islamique au Massachusetts Institute of Technology et à Harvard. Il a aussi restauré d’anciennes structures islamiques dans le monde entier.

Au Canada, l'Aga Khan a contribué à la création du Centre mondial du pluralisme à Ottawa et du premier musée des arts islamiques à Toronto.

Les récits diffèrent quant à la date et au lieu de la naissance du prince Karim Aga Khan. Selon le dictionnaire biographique français «Who’s Who», il est né le 13 décembre 1936 à Creux-de-Genthod, près de Genève, en Suisse, fils de Joan Yarde-Buller et d’Aly Khan.

L’étendue de l’empire financier de l’Aga Khan est difficile à mesurer. Certains rapports estiment sa fortune personnelle à plusieurs milliards de dollars.

Les ismaéliens – une secte originaire d’Inde, mais qui s’est étendue à de vastes communautés en Afrique de l’Est, en Asie centrale et du Sud ainsi qu'au Moyen-Orient – considèrent comme un devoir de lui verser jusqu’à 10 % de leurs revenus en tant qu’intendant.

«Nous n’avons aucune notion comme quoi l’accumulation de richesses serait un mal», a-t-il affirmé à Vanity Fair en 2012. «L’éthique islamique est que, si Dieu vous a donné la capacité ou la chance d’être un individu privilégié dans la société, vous avez une responsabilité morale envers la société.»

Il laisse derrière lui trois fils et une fille.

The Associated Press

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