Des chercheurs préviennent que la réforme énergétique de la CAQ va coûter cher
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Par La Presse Canadienne, 2024
QUÉBEC — La réforme énergétique du gouvernement Legault coûtera cher aux contribuables, et rien ne garantit qu'elle permettra d'atteindre nos objectifs climatiques, craignent des experts.
Jean-François Blain et Bertrand Schepper, de l'Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS), se sont penchés sur le projet de loi 69, désormais piloté par la nouvelle ministre Christine Fréchette.
Dans le mémoire qu'ils lui présenteront la semaine prochaine, ils affirment que le plan du gouvernement d'augmenter massivement la production énergétique d'ici 2035 entraînera une hausse tarifaire de 65 à 75 %.
Rappelons qu'Hydro-Québec prévoit des investissements de 155 à 185 milliards $ afin de doubler sa production, créer de la richesse et décarboner l'économie.
Ce plan repose sur une croissance «pharaonique» de la consommation de 56 TWh en 11 ans, alors que celle-ci n'a augmenté que de 13 TWh au cours des 20 dernières années, notent MM Blain et Schepper.
Cela «entraînera au minimum des hausses tarifaires de 65 à 75 % cumulativement sur 11 ans, soit 5 à 6 % par an, et appauvrira inutilement les ménages et les entreprises», écrivent-ils dans leur rapport.
Le premier ministre François Legault a déclaré à plusieurs reprises que tant qu'il sera en poste, il plafonnera la hausse des tarifs résidentiels à 3 %. En revanche, les tarifs pour les entreprises augmenteront.
Un fonds d'aide serait mis en place afin de compenser Hydro-Québec pour les pertes liées au gel des tarifs résidentiels, ce qui porte à croire que l'ensemble des contribuables paieraient la facture.
Par ailleurs, selon MM Blain et Schepper, le projet de loi 69 ne garantit pas la décarbonation de l'économie, car il n'est accompagné d'aucun plan de réduction de la consommation de produits pétroliers et gaziers.
Ils notent que l'ancien ministre de l'Économie et de l'Énergie, Pierre Fitzgibbon, a déjà attribué le tiers de la croissance prévue (+- 2500 MW) à des projets industriels qui ne contribueront pas à la décarbonation.
«La démarche privilégiée par le gouvernement (...) consiste à prendre prétexte d'une transition énergétique alléguée pour relancer l’investissement industriel aux frais de la collectivité», accusent-ils dans leur mémoire.
Un projet de loi antidémocratique, selon la FTQ
De son côté, la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ) estime que le projet de loi 69 présente des «risques significatifs pour la gouvernance démocratique des ressources énergétiques».
Le syndicat note entre autres que la pièce législative «centralise des pouvoirs excessifs au sein du ministère de l'Économie, au détriment d'une approche équilibrée et concertée».
Avec ce projet de loi, le gouvernement Legault néglige les enjeux environnementaux et de biodiversité, en favorisant plutôt des décisions purement économiques, selon lui.
La FTQ réclame donc la suspension de l'étude du projet de loi et la mise en place d'un «Plan de gestion intégré des ressources énergétiques» avant toute reprise des discussions.
«La gestion des ressources énergétiques ne peut être laissée au hasard ni soumise à des décisions précipitées», soutient-elle dans son mémoire.
«Les choix que nous faisons aujourd'hui définiront l'avenir non seulement de notre économie, mais aussi de notre environnement, de notre qualité de vie et de notre place sur la scène internationale.»
Six jours de consultations
Qu'à cela ne tienne, le gouvernement ira de l'avant en tenant six jours de consultations particulières, et ce, dès mardi prochain.
Quelques dizaines de groupes, dont Hydro-Québec, Énergir et Option consommateurs, pour ne nommer que ceux-là, défileront devant Mme Fréchette pour faire valoir leurs points de vue.
Fraîchement assermentée jeudi, la ministre Fréchette a promis de faire ses devoirs et d'«arriver préparée pour accueillir les groupes au sujet de ce projet de loi très important».
Caroline Plante, La Presse Canadienne