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Des anciens détenus poursuivent l'Ontario pour les conditions de détention

durée 13h46
3 juillet 2024
The Canadian Press, 2024
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3 minutes

Par The Canadian Press, 2024

TORONTO — L'Ontario est la seule province où les détenus sont régulièrement enfermés en raison d'un manque de personnel, selon les témoignages d'experts dans le cadre de deux recours collectifs.

D'anciens détenus d'établissements correctionnels provinciaux et des immigrants détenus dans ces établissements poursuivent les gouvernements de l'Ontario et du Canada, alléguant que les prisonniers sont généralement gardés dans leurs cellules pendant «des heures, des jours, voire des semaines» parce qu'il n'y a pas assez de personnel disponible pour les laisser sortir en toute sécurité.

Les poursuites couvrent une période allant jusqu'en 2017, mais les données les plus récentes de la province montrent que 81 % des détenus dans les prisons provinciales sont en attente de procès et sont présumés innocents.

Les confinements privent les détenus de leurs droits de la personne fondamentaux et violent leurs droits à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne, ainsi que le droit d'être à l'abri de peines cruelles et inhabituelles, garantis dans la Charte des droits et libertés de la personne, allèguent les poursuites.

«Pendant les confinements, les prisonniers souffrent d'une privation de soins de santé, d'intimité, de dignité, de sécurité et d'hygiène qui viole même les normes de base applicables aux détenus dans les établissements pénitentiaires», écrivent les avocats dans une déclaration.

«Ces conditions et leurs conséquences graves et préjudiciables sur les prisonniers persistent en raison de la négligence de la Couronne qui n'a pas doté les établissements correctionnels d'un personnel adéquat.»

L'Ontario se défend

La province, dans sa défense, fait valoir que les détenus ne sont pas privés de leurs droits de la personne fondamentaux pendant les confinements, car le personnel tente de maintenir les programmes et services essentiels tels que les tournées de médicaments et autorise les douches, les visites et l'accès à la cour lorsque cela est possible.

«L'Ontario nie que les confinements, y compris les confinements du personnel, se soient produits avec la fréquence ou la durée alléguée dans la plainte», écrivent les avocats du gouvernement.

«L'Ontario plaide que tout confinement (...) subi par les membres du groupe était justifié et n'a été imposé que lorsque cela était nécessaire pour assurer la sûreté et la sécurité des détenus et du personnel.»

Les poursuites, déposées en 2016 et certifiées collectives en 2017, avancent. Les plaignants rédigeant diverses expertises espèrent qu’un procès pourra être planifié pour l’automne 2025.

Michael Weinrath, professeur de justice pénale à l'Université de Winnipeg, a écrit dans un rapport qu'aucune autre juridiction provinciale au Canada n'utilise régulièrement le confinement pour gérer les pénuries de personnel.

«Pour résumer, la plupart des systèmes carcéraux au Canada connaissent certains problèmes d'absentéisme, mais embauchent suffisamment de personnel et gèrent le personnel de leurs établissements correctionnels pour permettre une couverture adéquate et éviter les confinements liés au personnel», a écrit M. Weinrath.

«L'Ontario ne s'est pas conformé aux normes minimales relatives aux confinements liés à la dotation en personnel, compte tenu de son recours régulier à des confinements liés à la dotation en personnel.»

La poursuite couvre les années 2009 à 2017 et les données obtenues grâce à une demande d’accès à l’information montrent que le nombre de confinements liés au personnel est passé de 252 en 2009 à 1750 en 2015, a écrit M. Weinrath.

Scott Hutchison, un avocat chargé de l'affaire, a déclaré que les comparaisons avec d'autres juridictions illustrent la situation alarmante de l'Ontario.

«Il y a une raison pour laquelle il s'agit d'une affaire ontarienne et non pas à l'échelle du pays, a-t-il affirmé en entrevue. C'est parce que toutes les autres juridictions ont réussi d'une manière ou d'une autre à gérer des établissements correctionnels provinciaux sans avoir à mettre en place des confinements de routine liés au personnel.»

Un recours collectif connexe au nom de personnes détenues par l'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) et détenues dans des établissements correctionnels de l'Ontario au cours de la même période allègue que leur traitement équivaut à une punition cruelle et inhabituelle.

Les deux recours collectifs réclament environ 1,5 milliard $ en dommages et intérêts.

Le gouvernement fédéral affirme dans sa défense que la loi sur la prescription s'appliquait sur les réclamations antérieures à 2014, mais affirme également qu'il a respecté la norme de diligence et a agi raisonnablement.

«Les choix politiques raisonnables [du procureur général du Canada] en ce qui concerne le système de détention des immigrants sont à l'abri des allégations de négligence», écrivent les avocats.

L'Ontario a depuis annoncé la fin d'un accord avec l'ASFC pour détenir certains immigrants détenus dans ses prisons.

Allison Jones, La Presse Canadienne